Un jour pour se rappeler
Le 2 novembre, jour des morts, occupe une place singulière dans le calendrier catholique. Il nous invite à honorer celles et ceux qui nous ont quittés. Au-delà de la visite au cimetière — où l’on nettoie et fleurit les tombes — ce jour propose un geste intérieur : se relier, poser un regard vivant sur l’invisible, et reconnaître que le lien d’amour ne disparaît pas avec la disparition du corps.
Le passage et sa lumière
Pour ceux qui restent, la mort demeure un passage difficile : elle bouscule, met à nu, confronte aux manques. Pourtant, pour le défunt, ce passage est un envol. Des récits d’expériences de mort imminente le décrivent comme un glissement vers la lumière, une expansion de conscience, un apaisement profond. Plutôt que de nous figer dans la tristesse, pouvons-nous envisager ce moment comme une métamorphose où la vie continue, autrement, mais pleinement ?
Ce que nous apprennent les EMI
Nombreux sont ceux qui, revenus de cette frontière, disent avoir ressenti une joie si grande qu’ils ne voulaient plus « redescendre ». Leur témoignage n’efface pas la peine des proches ; il l’éclaire. Il ouvre un espace où le chagrin peut cohabiter avec la paix, où la séparation, tout en demeurant réelle, n’est plus interprétée comme une fin absolue, mais comme un changement d’état.
Le témoignage de Nicole Dron
Nicole DRON, dans son livre, 45 secondes d’éternité, témoigne lorsqu’elle est cliniquement morte :
« J’avais le sentiment profond que tout était bien et que tout avait une raison d’être. Que malgré les adversités les épreuves et les souffrances il y avait un ordre un bien en puissance en évolution, que notre conscience terrestre ne pouvait appréhender. Tout concourt à notre bien et à notre évolution malgré les apparences, dans cet état j’ai pensé qu’ au-delà du chagrin et de la souffrance bien légitime que nous éprouvons lors du départ d’un être cher, nous devrions nous réjouir de savoir qu’il est retourné au pays ou qu’il est en route pour retrouver la vie. Oui si nous savions nous nous réjouirions. »
Quand « tout est à sa place »
Dans ma pratique de médiumnité depuis près de vingt ans, je retrouve cette sensation de plénitude : après le passage, quelque chose s’ordonne. Il règne chez les défunts un « sentiment de bien-être », comme si chaque chose retrouvait sa juste place — la lumière, l’âme (ou corps spirituel) et l’ancien corps physique, désormais délaissé. Cette perception n’invite ni à nier la douleur ni à l’abréger artificiellement, mais à reconnaître que la conscience poursuit son chemin.
Notre place de vivants
Nous, vivants, demeurons ici pour répondre à ce que la vie nous propose. Les aléas, s’ils sont accueillis, deviennent parfois plus traversables. Le jour des morts nous rappelle cette double fidélité : honorer nos disparus et demeurer fidèles à la vie qui continue en nous. En choisissant une posture intérieure d’ouverture, nous transformons le deuil en un mouvement de relation, discret mais réel.
Se réjouir pour eux… et s’ouvrir au lien
« Réjouissons-nous » pour nos défunts, dit Nicole Dron. Cela ne signifie pas minimiser le chagrin, mais y ajouter une confiance : si, pour eux, « tout est OK », alors notre cœur peut se desserrer. Cette détente intérieure crée souvent les conditions d’un échange subtil. Quand l’émotion se dépose, la présence s’entend mieux. Le lien n’est plus une recherche anxieuse ; il devient reconnaissance.
Lâcher-prise : l’exemple de mon père
Depuis le départ de mon père, il y a plus de trente ans, j’ai choisi cette voie. À l’époque, j’ai trouvé que soixante-huit ans, c’était jeune pour partir. Et pourtant, en moi, s’est imposée une évidence : « c’est sa destinée ». À partir de cet instant, j’ai pu l’entendre et le comprendre autrement. Parce que j’avais relâché mon emprise émotionnelle, le dialogue a pu se faire, simple et vivant, sans forcer quoi que ce soit.
Un geste intérieur pour le 2 novembre
En ce jour des morts, je vous invite à poser un geste silencieux : dites intérieurement à vos défunts, « j’accepte que tu sois parti ; je remets mes émotions à l’univers ». Ce n’est pas une injonction à ne plus pleurer ; c’est une offrande. En déposant la surcharge affective, vous créez un espace disponible où une communication devient possible, naturelle, sans spectacle ni promesse.
Apprendre à reconnaître les signes
Ensuite, soyez attentifs. Les signes sont parfois discrets : un oiseau inhabituel, une ampoule qui clignote, une télécommande récalcitrante, une chanson qui arrive au bon moment, une forme dans les nuages, un parfum familier. Les défunts savent emprunter ces chemins, parce que ces chemins nous parlent. L’important n’est pas l’extraordinaire, mais la justesse : le signe résonne en vous, comme une évidence douce.
Deux histoires, deux clins d’œil
Un jour, le père de ma mère m’a prévenu que celle-ci recevrait un message par « un oiseau étonnant ». Je l’ai aussitôt dit à ma maman. Quelques jours plus tard, elle m’appelle : un perroquet s’est posé dans son jardin — en Gironde ! Une autre fois, lors d’une conférence, une défunte a fait clignoter une ampoule juste au-dessus de sa fille assise dans la salle. Ces clins d’œil ne forcent rien ; ils indiquent une proximité.
Disponibilité plutôt qu’attente
Pour autant, guetter les signes avec crispation ferme la porte. La disponibilité n’est pas l’attente anxieuse ; c’est un accueil. Vous pouvez demander un signe, puis relâcher la demande, comme on confie une lettre à la poste. La réponse vient si elle doit venir, d’une manière qui vous parlera. La relation avec l’invisible suit les lois de la vie : elle aime l’humilité, la simplicité, l’authenticité.
Un petit rituel pour aujourd’hui
Je vous propose une expérience, aujourd’hui 2 novembre : pensez à un défunt cher, appelez-le intérieurement et demandez-lui un signe distinctif. Puis revenez à vos occupations. Pas de tension, pas d’ultimatum. Si quelque chose survient, remerciez. Si rien ne vient, remerciez aussi : le silence est parfois un signe de paix. Dans tous les cas, ce rituel affine votre écoute et vous relie à la gratitude.
Vivre, honorer, continuer
Honorer nos morts n’est pas s’arracher à la vie, c’est la vivre plus juste. Le jour des morts nous offre un rendez-vous : déposer un peu de chagrin, reconnaître la lumière du passage et rester en contact avec ce qui nous appelle en avant. Nos défunts n’attendent pas que nous nous immobilisions pour leur prouver notre amour ; ils nous invitent, au contraire, à marcher, à créer, à aimer — parce que la vie continue, ici… et ailleurs.
